Deux Belges continuent à jouir de l'impunité

Les assassins de Lumumba rôdent parmi nous !

Les restes supposés du héros national congolais et panafricain Patrice Emery Lumumba ne seront donc pas restitués à sa patrie ce mois-ci, officiellement en raison d'une recrudescence de l'épidémie de COVID-19 à Kinshasa.

Alors que les cérémonies prévues auraient pu, non seulement faire l'objet d'une récupération politique, mais servir de paravent pour un classement de l'affaire, ce nouveau délai doit donner l'occasion aux forces progressistes et anti-impérialistes de réclamer avec plus d'insistance l'établissement de la vérité historique et judiciaire dans l'assassinat du premier chef de gouvernement du Congo indépendant, et la condamnation des auteurs et complices du crime.

Le Parti communiste de Belgique (PCB) salue le Collectif Heshima kwa Lumumba, Mpolo na Okito, s'associe à sa manifestation du 19 juin et ajoute sa voix à ses revendications. En particulier, le PCB rappelle que, depuis dix ans presque jour pour jour, une plainte a été déposée auprès du tribunal de première instance de Bruxelles par les enfants de Patrice Emery Lumumba pour l'assassinat de leur père. Elle visait une dizaine de responsables belges impliqués dans cet assassinat. Dix ans plus tard, bien que déclarée recevable en 2012 et imprescriptible car relevant des « violations graves de droit international humanitaire », l'affaire est dans les mains d'un juge d'instruction qui semble avoir l'a mise au frigo.

En outre, seuls deux des suspects du crime sont encore en vie : Jacques Brassinne de La Buissière, employé alors par un service de soutien aux sécessionnistes du Katanga dépendant du ministère belge des « Affaires africaines », et l'homme d'affaires et politicien bien connu, Étienne Davignon, qui a cumulé les plus hauts postes dans le groupe Suez, à la Société générale, dans les cabinets ministériels belges, à la Commission européenne ou encore au groupe mondialiste semi-secret Bilderberg, dont il est président honoraire. À l'époque de l'assassinat de Lumumba, Davignon était « stagiaire diplomate » à l'ambassade de ce qui était encore Léopoldville. Les deux hommes, maintenant nonagénaires ou presque, il semble que la stratégie de la justice belge pour éviter de les juger – et de mettre à nu la responsabilité de l’État belge – est d'attendre leur mort.

Une telle issue ajouterait à la honte de l'assassinat celle de la fuite devant les responsabilités. Cela démontrerait que, plus de six décennies plus tard, les autorités belges ne sont pas prêtes à reconnaître les crimes de leurs prédécesseurs. La vague « responsabilité morale » de la Belgique, admise il y a vingt ans par une commission parlementaire, ne suffira jamais si les exécutants de cette politique, visant à briser l'indépendance de l'ex-colonie, demeurent impunis.

D'autre part, le PCB souhaite que le délai survenu dans le rapatriement des restes de Lumumba – en en l'occurrence une dent – soit mis à profit pour procéder à une analyse ADN. Il rappelle que le policier belge – aujourd'hui décédé – qui a assisté à la dissolution dans l'acide du corps de Lumumba et dit avoir conservé pendant plus d'un demi-siècle cette dent, tel un trophée de chasse, a plusieurs fois varié dans ces déclarations à ce sujet et qu'il est donc permis d'avoir des doutes sur son authenticité. En tant que « corps du délit », la justice belge devrait donc, sans tarder, ordonner l'expertise génétique de cette dent.

Enfin, le PCB soutient les forces qui, en République démocratique du Congo, doutent des intentions réelles des autorités de Kinshasa entourant les cérémonies d'inhumation des restes de Lumumba. Il rappelle qu'Étienne Tshisekedi, père de l'actuel président, était vice-ministre de la Justice dans le gouvernement putschiste de Mobutu, qui ordonna la déportation de Lumumba au Katanga sécessionniste d'où il savait qu'il n'en reviendrait pas vivant. Selon nos informations, le président actuel n'a jamais pris de distances avec les agissements de son père, dont son long soutien aux tortionnaires de Mobutu actifs dans l'élimination des cadres et militants lumumbistes et d'autres patriotes.

De même, des excuses publiques du roi actuel pour le soutien de son oncle Baudouin à l’assassinat de Lumumba devraient accompagner un processus de remise à niveau radicale des relations belgo-congolaises, fondée sur le respect dû aux victimes et un partenariat d'égal à égal entre les deux peuples.

 

 

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